Quand une journaliste participe à un atelier d’écriture

Merci à Estelle Levêque de l’Yonne Républicaine d’avoir participé à l’atelier d’écriture ludique et créative au parc de la Ballastière à Saint-Clément. Elle a aussi recueilli les impressions de quelques participants.

Jeudi 21 juillet 2021 – L’Yonne Républicaine

Voici quelques textes de l’atelier :

Aujourd’hui je me présente au nom de Noa, car c’est le petit garçon qui est venu me représenter en tant qu’amoureux de l’été. J’ai roupillé toute la journée. Cette journée est très importante car des personnes sont venues m’admirer en tant que roi de la journée. J’ai connu plein de souffrances éternelles tout au long de ma vie.

Mais cette année a changé, un couple d’hirondelles s’est installé, les enfants sont venus me regarder avec ce beau ciel bleu de juillet. En tant qu’arbre de forêt, je précise au parc de la Ballastière, je suis un platane (enfin je crois), je vais profiter des derniers jours de juillet. Une barricade s’est installée, la nature est polluée… Maintenant que les grands sont partis et les petits aussi je vais me reposer avant le prochain printemps.

Signé Noa (10 ans) en direct du Parc de la Ballastière

L’arbre

Je suis majestueux avec le vent qui fait souffler mes branches dans l’air époustouflant, au milieu du ciel bleu. En face de ma branche, voilà la Provence avec des chemins recouverts de violet épatant. Puis je pense à mon cousin le chêne qui est entrain de souffrir au milieu de la ville devant un poteau électrique. Je me suis senti faiblir lorsqu’un garçon haut comme trois pommes me dit « tu es beau toi avec tes racines lisses et ton sourire malicieux ». Je répondis « merci de m’avoir parlé ». Puis le garçon repartit.

Mathis 10 ans

A toi qui tient ce crayon vert, je t’adresse une promesse que m’a faite mon grand-père :

« Fais confiance aux humains qui prennent le temps de s’asseoir sur ce banc :

Observes-les, ressens-les et tu capteras leurs bonnes ondes ».

Alors oui…à toi qui tient ce crayon vert, j’ai envie de transmettre une petite prière,

Touche-moi mais ne me sacrifie pas, parle-moi mais ne m’insulte pas, joue avec moi mais ne me blesse pas, assieds-toi sur moi mais demande moi…

A toi qui tient ce crayon vert, je souhaiterai te confier mon secret si cher,

En me regardant de face, tu as pu remarquer notre complémentarité avec mon jumeau.

De ce bel et solide ancrage, nous nous sommes scindés, non pas en 2, comme pourrait le montrer les apparences, mais en 3.

A toi qui tient ce crayon vert, si tu prenais ton temps en m’observant à l’envers,

En ouvrant ton regard vers quelque chose de plus grand, tu verrais ce vide immense que nous a laissé notre frère.

Il n’a pas survécu aux intempéries, trop fragile, trop sensible, il s’est brisé..

A toi qui tient ce crayon vert, j’ai envie de te partager mes  chimères

Son absence a laissé place à un joli banc, naturel, en bois de Frêne.

Je peux ainsi humer les doux parfums des humains qui viennent se lover contre mon écorce.

Nous pouvons également entendre leurs plus grandes joies, comme leurs plus grandes peines.

Il y a même de quoi recueillir leurs larmes au cœur de notre tronc, regarde…là !

A toi qui tient ce crayon vert, bienvenue dans ce joli parc de la Balastière,

Nous pourrions tous te conter de jolies histoires, il suffit juste de prendre le temps de te poser, de flâner et de t’émouvoir.

Mélanie 36 ans

Elegansis arbricus – L’arbre de passage

Le ciel est violet de colère. Le parc se vide peu à peu, plus rapidement qu’à l’ordinaire. Les pas se font plus pressés, bien que certains prennent encore le temps de discuter : 

– J’aime bien passer par là.

– Moi, j’aime mieux passer par ici.

Passer !

J’en ai vu passer ! Des familles joyeuses, des enfants boudeurs, des marcheurs énergiques. Des cours de yoga, des ateliers de peinture, de dessin, d’écriture aussi.

Je suis celui devant lequel on passe. On ne s’arrête pas, je suis juste là, au bord du petit chemin. Je suis là et j’invite à aller plus loin. C’est dans la clairière, sous les frondaisons centenaires que vont s’isoler les amoureux.

Moi, j’ai mes passants réguliers : le jeune homme de la fin de matinée, par exemple. Lui, il ne vient pas tous les jours, mais une ou deux fois par semaine. Toujours vers la même heure. Il vient s’asseoir et rêver dans une flaque de soleil. Il a toujours un livre à la main, mais il rêve tant que c’est peut être toujours le même.

Il y a aussi le couple de bavards. Ou plutôt, le bavard et celle qui l’écoute. Lui parle, parle, parle encore, elle semble l’écouter, dit « oui », « ah, tu crois », quand il le faut. Mais je vois bien que son regard flotte sur l’eau, s’égare dans les roseaux. Eux, c’est plutôt en fin d’après-midi qu’ils arrivent, chaque fois du même côté et font leur tour, toujours dans le même sens.

Les deux petites viennent souvent aussi. Les deux petites ! Ça fait bien longtemps qu’elles fréquentent le parc. Les premières fois, elles étaient toutes jeunettes. Elles ont bien grandi depuis, mais pour moi, elles restent « les deux petites ». Je ne sais pas ce qu’elles se racontent, elles parlent trop doucement pour que je les entende. Parfois, leurs mains s’effleurent et la tendresse s’installe.

C’est ainsi que se déroulent les journées, rythmées par les visiteurs habituels et les visites impromptues. Un groupe de jeunes, agités et braillards qui finissent par se calmer, pris par la sérénité du lieu. Les mamans, venues montrer les canards aux petits.

Je me prends à rêver. Et si mes passants qui passent se croisaient un jour par inadvertance. Les deux petites et le couple de bavards par exemple. Qu’adviendrait-il ? Se rencontreraient-ils, se verraient-ils ? Ou bien chacun, chacune resterait-il ou elle ancré dans son histoire ?

On passe aussi devant moi pour sortir, après avoir fait le tour. Certains visiteurs, la plupart, je crois, font le tour du parc par le sentier qui s’enfonce sous la voute d’un vert sombre. Est-ce une règle ? “Si on peut faire le tour, merci de le faire !” Quelques autres viennent juste s’asseoir dans leur coin, sur leur banc.

Et moi, je suis là. Je ne suis pas celui devant lequel on s’arrête, Je ne suis pas celui qu’on voit. Je suis juste celui qui est là, celui devant lequel on passe !

Pascale

L’aulne

Moi l’Aulne penché quia les pieds dans l’eau de l’Etang de la Ballastière et la peau rugueuse comme celle de l’éléphant, je ne suis pas un lève tôt.

Dans ce parc, il y a des promeneurs qui en cette et par beau temps le sont : pour promener leur chien, se dégourdir les jambes ou courir.

Plus tard, ce sont les promeneurs qui flânent.

Après des semaines très arrosés, le vent du nord s’est levé et a chassé toutes les larmes du ciel.

Il y a une élégante Amélie bleue qui danse dans les airs.

Les Foulques trompettent et hop, dans un plongeon, tête la première, ils vont manger. Leur territoire : les roselières mais ce ne sont pas eux qui jouent de la musique avec le vent. C’est plutôt le vent qui me décoiffe et fait bruisser mes palmes.

Les cygnes sont de l’autre côté.

La famille Foulque avec ses deux petits affronte les vaguelettes mais si petit, ils pourraient être submergés et les voilà plus à l’abris d’un Frêne plus penché encore que moi.

Des jeunes sur un banc profitent du soleil, ils se sont rapprochés de l’eau mais ils ont toujours dans la main une drôle de machine et pourtant tout est si beau ici.

Deux hirondelles attrapent des insectes en vol. Elles sont agiles.

Ah revoilà notre famille Foulque : les deux bébés ne se lâchent plus et s’aventurent plus loin pour rejoindre leur mère.

Moi, je ne me lasse pas de l’endroit où je suis né et j’ai grandi même si on me réveille trop tôt et si les conditions climatiques sont de plus en plus dures. J’ai toujours les pieds dans l’eau et de bons voisins.

Bénédicte

2 commentaires pour “Quand une journaliste participe à un atelier d’écriture

  1. il y a plus de cinquante ans, cet étang et ce parc était à l’abandon et j’ai commencé à pousser un peu au dessus de l’étang. A cette époque, je ne voyais personne et j’étais caché dans les ronces et les broussailles. Personne ne serait venu s’aventurer par ici, dans ce lieu où les animaux venaient se cacher pour finir leur vie, où les braconniers venaient chasser à la lanterne à la tombée de la nuit.
    Un jour, des hommes sont venus et ils ont fauché un peu les broussailles, ils se sont fait un chemin et ont tout observé. Ils ont marqué certains arbres pour les couper. J’ai eu de la chance, je n’ai pas eu de croix…
    Quelques temps plus tard, des ouvriers sont venus, je les ai vu débroussailler les sous-bois, curer l’étang, installer des jeux pour les enfants, prendre soin des animaux.
    A mes pieds, ils ont installé des tables de pique-nique, un banc et même une grande porte.
    Eh oui, j’étais là, je l’ai vu naître” le parc de la ballastière”.
    Maintenant, j’ai beaucoup de visites : le gardien vient ouvrir les portes le matin et il vient les refermer le soir.
    Et toute la journée, j’observe les sportifs avec leurs chaussures de sport ou de randonnée, les groupes d’enfants du collège voisin qui viennent m’observer et lire ma pancarte. Eh oui, je suis promu au rang d’arbre remarquable depuis peu tant je suis devenu grand et majestueux.
    Je peux voir les reflets bleu turquoise de l’étang et j’aperçois les canards, les cygnes, les tortues, les ragondins…
    Toute la journée, je vois des personnes qui lisent, d’autres qui écrivent, mais ce lieu reste tellement calme.
    et le soir, le gardien vient refermer la porte de mon entrée et moi, je veille sur mon parc, oui, c’est le mien, je le connais depuis si longtemps.

    1. Un texte avec une approche historique sur le parc de la Ballastière. Les écrivants présents à l’atelier ont apprécié.

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